06 février 2011

Chambre n°111

jeudi 3 février
Toute ma journée a été égayée : j'ai ma chambre ! C'était la dernière chambre disponible et je comprends pourquoi. Son seul avantage est de ne pas donner directement sur la rue, peut-être avec celui d'être au rez-de-chaussée, donc à proximité de l'entrée et du réfectoire (the mess, comme à l'armée). Mais cette situation peut aussi être un inconvénient dans la mesure où donner sur la cour centrale (dans un bâtiments où les allées et les couloirs sont extérieurs) est la garantie d'être aux premières loges des discussions "de couloirs", justement. Et l'assurance de ne jamais avoir de soleil. En été, je m'en réjouirai certainement, mais nous n'y sommes pas encore. Je vais probablement manquer de lumière, et j'ai déjà plus froid que dans le dortoir (Mahi et Fatima ne doivent pas savoir que j'ai ressorti le pyjama long et les chaussettes). On entend encore les klaxons de dehors mais ils ne devraient pas tarder à se calmer – tous ces gens finissent quand même par aller dormir.
La salle d'eau est juste à côté, c'est bien pratique. Je dois réviser mon jugement : elle n'est pas si spartiate. Certes, il n'y a pas de papier toilette (les Indiens n'en utilisent pas – on l'achète au rouleau et il coute une fortune : 38 roupies, le prix d'un repas), certes le cumulus déborde de rouille et l'eau n'est pas toujours très chaude, certes la poire de douche ne fonctionne pas et on se lave avec un seau (pour mélanger l'eau chaude et l'eau froide puisqu'il n'y a pas de mitigeur) et un petit récipient verseur, mais le sol est en marbre vert, les douches sont grandes et les toilettes à l'occidentale. Et jusqu'à présent, il y a toujours eu de l'eau. On dirait que je m'habitue vraiment... Certes, la poussière est partout : en tas au bord de la route, en couche épaisse sur ce qui ressemble vaguement à un trottoir, dans l'air qui en devient jaune, sur tout ce qu'on achète dans les boutiques qui n'ont pas de porte (et qui sont en majorité), dans ma chambre avant que je récure tout, sur mes chaussures évidemment (et dire que bientôt il faudra mettre des sandales...). Certes les repas au mess ne sont pas très variés. Certes certes... Mais on s'y fait.
Ces derniers jours, j'ai parlé avec plusieurs filles de la résidence : des Iraniennes, des Indiennes bien sûr, une Tibétaine, des Allemandes, des Kenyanes, une Mauritienne (en français), une Finnoise... J'essaie de ne pas m'éterniser auprès de celles qui ne savent que se plaindre, je préfère entendre parler d'expériences positives. Et de choses que je ne connais pas, comme la religion bahaïe de l'Iranienne, ou que je connais mieux, comme le bouddhisme de la Tibétaine. Nous avons aussi des nonnes vietnamiennes parmi nous, j'espère avoir l'occasion de discuter avec elles. Ces quelques conversations, même si elles ne sont pas très profondes et si j'ai déjà oublié la plupart des prénoms, m'aident à me sentir moins à l'écart. Je remarque aussi à quel point le fait d'avoir mon nid, mon lieu de repli, mon cocon, m'aide à m'ouvrir aux autres. Maintenant, je suis vraiment arrivée. Je suis en Inde.

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